En sortir 23 pour 2023·Fantastique Fantasy·Littérature française

Les seigneurs, les révoltés de Bohen

Quand on lit les quatrièmes de couverture, on est aussitôt transporté dans l’univers créé par l’autrice, Estelle Faye. La lecture des premières lignes ne dément pas la prime impression, on est happé par l’atmosphère épique, le rythme narratif et les nombreux personnages.

Bohen est un empire dont la richesse est issue de l’extraction du « lirium, ce métal aux reflets d’étoile, que les nomades de ma steppe appellent le sang blanc du monde ». Depuis dix siècles Bohen règne sur le monde, exploite, sans pitié, ses peuples et pense être éternel. Or, les empires ne sont-ils pas voués à s’effondrer quand leur cycle arrive à sa fin ? L’éternité n’est que pour les dieux et non les hommes, non ?

Bohen, c’est des puissants, des manipulateurs politiques, des guerriers sans foi ni loi, des superstitions, des damnations, des exclus, des despotes non éclairés, de le peur, de la violence au nom du pouvoir ou d’une idée. C’est aussi les murmures des petites gens, des idéalistes, des résistants qu’un escrimeur hors pair, Sainte Etoile, persuadé d’être l’hôte d’un monstre, qu’une morguenne, Maëve, sorcière des ports des Havres, rêvant de libérer l’océan des voiles noires maudites, qu’un clerc de notaire, Wens, expédié dans l’enfer des mines, qui y découvre une nouvelle voie aussi mystique qu’audacieuse. Ce sont leurs mots ; leurs actes que le vent des steppes emporte jusqu’aux confins de Bohen.

Quand le terreau est enfin prêt, la révolte peut commencer et l’empire se déliter. Quinze ans se sont passés, le souffle de liberté et d’espoir a secoué les tréfonds du vieux monde. La mystique de Wens a réveillé d’anciennes forces, dans la capitale de l’empire remuent les mânes des prédécesseurs, vaincus par leurs expériences et leurs déviances. Des léviathans ouvrent les yeux, des golems se préparent à quitter leur gangue de glaise, des confréries luttent pour conserver leur savoir. Le temps des monstres est prêt à poindre. Alors que tout semble perdu, les feux fragiles luisent dans la nuit, espoirs que chaque héros des « Révoltés de Bohen » portera depuis son pays afin de combattre le Mal absolu.

« Les seigneur de Bohen » et « Les révoltés de Bohen » sont deux chants épiques servis par l’écriture incisive d’Estelle Faye. Elle fait la part belle aux personnages féminins dans une fresque de fantastique et de fantasy. Ils évoluent dans un étrange moyen-âge aux accents d’Europe centrale avec des épisodes dans l’aridité africains et l’humidité glauque d’une jongle asiatique. Les personnages, principaux comme secondaires, sont extrêmement bien campés et incarnés par leur construction psychologique, tantôt leur humanité est mise en avant, tantôt leur côté obscur l’emporte. Ainsi, le lecteur assiste à la valse des trahisons, des complots, des victoires héroïques. Il y a de l’action, de l’amour, de la tendresse, de la fidélité, des tentations plus ou moins inavouables, de la violence – les scènes de batailles sont tonitruantes comme les carnages perpétrés avec sauvagerie -, de la rage, de la soif de vengeance. Les ingrédients épiques sont tous présents et le résultat est plus que réussi.

Le premier épisode est plus lumineux que le second, plus sombre, plus macabre, mais la force narratrice est puissante du début à la fin. Moi, qui suis amatrice du genre, j’ai été emportée par la folie des récits, les descriptions extraordinaires des lieux, des événements et des personnages, la musicalité de la langue variant selon l’intensité de l’action. Ce qui m’a beaucoup plus, également, c’est la dualité des personnages qui ne sont ni tout blancs ni tout noirs, le gris bleuté des personnalités en fait leur force et la richesse de l’épopée d’un monde. J’ai pu être révulsée par certains personnages sans pour autant avoir, envers eux, une absence d’empathie. Ils sont, tous, l’incarnation de la complexité de la nature humaine.

Une lecture intense, des romans qui ne se lâchent pas malgré quelques petits défauts (il y a des intrigues de second plan qui n’apportent rien de plus à l’ensemble de la fresque) !

Quelques avis:

Babelio (T1) Babelio (T2) Belial (T1) Belial (T2) Apophis (T1) Rose (T1) Syfantasy (T2)

Lu dans le cadre

4 commentaires sur “Les seigneurs, les révoltés de Bohen

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