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Premières lignes #1

Je suis tombée sur un partage des plus sympathiques sur FB, merci Magali Vaugier! L’initiative vient d’une blogueuse Ma lecturothèque qui a donné envie à Light and Smell de participer à ce rendez-vous hebdomadaire. Cela m’a donné, par ricochet, envie d’ouvrir une nouvelle rubrique chez Chatperlipopette.

Le principe: chaque semaine je prendrai un livre dans ma bibliothèque et je recopierai ses premières lignes.

J’ouvre la rubrique par les premières lignes d’un roman terminé il y a deux semaines, « L’échappée » de Valentine Goby.

Résumé

 » Nous marchons, suivies par la foule, têtes rasées parmi les décombres de l’avenue janvier, de la rue Saint-Hélier dévastée, criblée de béances et d’immeubles en ruine, pendant des semaines c’étaient des gravats enchevêtrés de poutres, de meubles brisés, chambres, cuisines, salles à manger réduites en poussière, éclats de verre, j’imagine que c’était comme ça, tout est déblayé et vide maintenant, je trébuche sur des souvenirs que je n’ai pas, les bombardements ont eu lieu sans moi, j’étais terrée dans un couvent mais je sais tout, ils m’ont lait ce que la guerre leur a fait. »

« L’échappée » ou le destin d’une jeune paysanne bretonne coupable d’avoir aimé un pianiste allemand pendant l’Occupation. Valentine Goby signe un livre tragique et puissant sur l’identité et la liberté.

Les premières lignes

Madeleine grelotte. Elle souffle sur ses doigts. Une main après l’autre. Un froid mouillé s’engouffre sous sa jupe. Elle plaque sa jupe contre ses cuisses. Les arbres nus succèdent aux arbres nus, découpés sur le ciel gris-mauve. Elle fixe le ruban d’asphalte. Elle serre le châle sur sa poitrine. Le noeud se défait. La laine oscille contre sa joue, énervante. Elle enfonce le bonnet sur ses oreilles. Elle pédale à toutes jambes. La dynamo frotte contre la roue. C’est une vibration légère, berçante. Le phare n’éclaire rien, affaibli par la toile réglementaire. Tout juste utile à signaler une présence humaine aux halos tremblotants qui la croisent. Un soupçon de vie dans l’hiver.

Dix kilomètres de bruine encore. Rennes est une masse obscure à l’horizon, serrée derrière d’épais rideaux, des volets clos. A cette heure, Jeanne est arrivée à l’hôtel après un détour par les bois sur le porte-bagages d’Antoine; un détour par Antoine tout court. Elle a emporté par erreur la clé du cadenas de la bicyclette. Il a fallu deux heures à Madeleine pour forcer la serrure.

La route est étroite, bordée d’obstacles. Ornières, ruisseaux cachés, petits ravins, buissons de ronces. Elle longe les champs immobiles, déjà pris sous le givre. Pleins de craquements. De cris de bêtes. Le ciel compact ne laisse filtrer, à l’ouest, qu’un rai de lumière violette, presque noire.

Un grelot familier se rapproche. Madeleine accélère, pose les deux mains sur le guidon. Sa jupe s’envole. Frédéric la frôle, debout sur les pédales. Il se poste en travers de la route. Elle pile.

Etes-vous tenté(e)s par sa lecture?

9 commentaires sur “Premières lignes #1

    1. Il est vrai que les premières lignes, ou première page, sont primordiales: elles permettent d’entrer rapidement dans le roman ou elles provoquent une pénibilité de lecture.
      Cependant, il est fortement conseillé de ne pas abandonner dès la première page.

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  1. Je suis contente de te voir rejoindre le RDV et te remercie pour le lien 🙂
    Je ne connaissais pas ce roman mais je trouve ces premières lignes prenantes, intrigantes et un peu angoissantes par l’atmosphère de tension qu’elles introduisent…

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    1. Je ne connaissais pas du tout ce RDV et c’est grâce au partage de ton article par Magali Vaugier que je me suis lancée.
      Je trouve cette idée vraiment sympa et intéressante.
      Valentine Goby a une écriture fluide qui happe rapidement le lecteur. J’aime beaucoup ce qu’elle écrit, elle aborde des sujets souvent dérangeants.

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