Littérature française·Prix Louis Guilloux 2024

Les eaux du Danube

Le roman de Jean Mattern « Les eaux du Danube » fait partie de la sélection du Prix Louis Guilloux 2024. C’est avec ce titre que je commence ma participation à ce prix littéraire.

Le narrateur est pharmacien à Sète depuis plus de vingt ans. Il est marié à Madeleine, spécialiste de Paul Valéry, et mène une vie calme et sans histoire : Clément Bontemps est, aux dires de Madeleine, un homme sans passion. Etre issu de la bonne bourgeoisie lyonnaise n’est pas le tremplin rêvé pour une vie hors norme. Clément a toujours appris qu’il n’était pas nécessaire d’être extravagant, fantasque rejetant les cases sociales pour être heureux …. surtout pas. Ne pas faire de vague, ne pas se faire remarquer, apprendre le solfège, un peu, bachoter, beaucoup. Le couple a un fils, Matias, brillant élève de terminale, promis à un bel avenir universitaire. Le jeune homme est passionné de littérature et de musique comme sa mère.

Tout vole en éclats, certitude, vie conjugale, idée du bonheur, suite à l’appel téléphonique du professeur de philosophie de son fils. Clément se retrouve face à un questionnement intime tel que les fondations de sa vie, construites sur le calme de la monotonie rassurante, tremblent au point de le faire vaciller. Clément, d’homme presque dénué d’émotions, devient fantasque en allant à la plage pour la première fois en vingt ans, en liant connaissance avec une touriste écossaise, en échangeant régulièrement avec le prof de philo, George Almassy, portant le même patronyme que sa mère. Cet homme lui expliquera le passé après-guerre de la Hongrie, l’éveillera ainsi aux vérités, sous ses yeux, qu’il ne voit pas. Peu à peu, Clément renaît à la vie.

« Les eaux du Danube » est un roman sur la quête de l’intime, l’ouverture, un à un, des tiroirs secrets d’une vie, sur la quête des origines, sur le masque des faux-semblants : Madeleine, Matias sont-ils ce qu’ils paraissent ? Clément, au fil des découvertes, les perçoit sous un autre jour et découvre l’effet libérateur de l’introspection.

Jean Mattern a écrit un roman d’une grande délicatesse autour des faux-semblants, de la filiation, de l’homosexualité et de la musique, Schubert et ses pièces musicales rythment le récit et magnifient les personnages. L’écriture est somptueuse par l’apparente simplicité des mots, ces mots délicats qu’il a choisi avec attention afin d’atteindre la justesse dans son propos. Chaque mot est pesé et posé, sans fioriture inutile, pour apporter une dimension de transmission filiale au récit. L’émotion est toujours présente sans être mièvre, l’émotion est suscitée au gré des mots justes et simples, ceux qui font mouche et qui touchent.

Un excellent roman sur le pas-de-côté, le lâcher-prise, la filiation et l’ébranlement des certitudes dans une vie bien réglée. Une lecture qui m’a marquée et profondément touchée .

Quelques avis :

Babelio Papivore Jean-Paul

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1/10

Le Mois anglais·Littérature anglaise

Sept mers et treize rivières

J’ai choisi ce roman parce que j’apprécie beaucoup les histoires d’immigration et d’intégration dans un pays étranger. « Sept mers et treize rivières » relate avec drôlerie et humour, l’histoire d’une femme bangladaise, Nazneen, émigrée à Londres. Elle a rejoint Chanu son époux, choisi par ses parents et plus âgé qu’elle, en Angleterre pour fonder une famille et prospérer.

Monica Ali met en scène une intégration lente et difficile : Nazreen ne parle pas anglais, contrairement à son mari, de temps à autre elle aimerait suivre des cours de langue pour mieux s’intégrer et être plus indépendante, or Chanu lui explique qu’il n’en voit pas l’intérêt puisqu’elle n’a de contact qu’avec des personnes et des commerçants issus du même pays dans ce quartier de Brick Lane. Nazreen ne quitte que très peu l’appartement, encombré par le bric-à-brac accumulé par Chanu pour mettre en œuvre des projets qui tombent toujours à l’eau. C’est qu’il parle beaucoup, vraiment beaucoup, sans réellement agir avec efficacité. Notre héroïne est soumise et effacée, elle prend soin du ménage, de son époux bavard et brouillon, renonce à avoir un appartement rangé et passe sa vie à écouter Chanu et à écrire à sa sœur Hasina restée au pays. La vie s’étire en un immense ennui, dans l’attente d’un événement qui mettra de la passion dans le plat terne de l’existence de Nazreen. L’événement en question sera l’arrivée d’une machine à coudre, cadeau, pour une fois utile, de Chanu.

La machine à coudre introduira dans la vie de Nazreen, Karim, un beau jeune homme, et le goût de l’interdit. Elle conduira également Chanu à regarder la réalité en face, à son corps défendant, et à l’accepter, montrant ainsi une capacité, insoupçonnée, de hauteur d’âme et d’intelligente bonté.

Même si la quatrième de couverture n’a pas tenu ses promesses, j’ai suivi avec empathie la vie, pas très folichonne, de Nazreen, écrasée par le poids des traditions et le choc culturel avec la culture anglaise. Elle tente, dans ses lettres, de cacher à sa sœur la grisaille de sa vie qui pourtant semble plus ensoleillée que celle d’Hasina malmenée par l’existence. Chacune traîne le poids de leur destin, parvient à surmonter les écueils sociaux, en subissant souvent des déceptions douloureuses, pour tracer leur chemin vers la voie ardu de l’émancipation de leur condition de femme peu instruite. Chacune à sa manière y parviendra.

J’ai aimé la galerie de portraits des personnages : l’autrice est sans complaisance et égratigne aussi bien Chanu que Karim, Nazreen que ses amies. Ses descriptions cocasses, drôles ou amères et désabusées leur donne chair, imprègnent le décor de la cité en perdition parce qu’oubliée des politiques, soulignent la montée de la radicalisation islamique suite au 11 septembre 2001. Par petites touches, l’atmosphère prend corps, les menus faits du quotidien s’imbriquant dans les grands événements historiques.

« Sept mers et treize rivières » est un roman intéressant malgré quelques longueurs (bien que ces longueurs, justement, permettent d’appréhender la particularité de la vie de Nazreen) montre combien l’intégration est une gageure loin d’être facile à tenir.

Traduit de l’anglais par Isabelle Maillet

Quelques avis :

Babelio Wodka A propos de livres Café Powel Loumano

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La BD de la semaine·Littérature française·Littérature japonaise·Roman graphique/BD

Les dames de Kimoto

J’avais lu, il y a quelques années, le roman éponyme écrit par Sawako Ariyoshi, lecture que j’avais appréciée mais pas chroniquée. Quand j’ai vu que ma médiathèque avait la version roman graphique, je l’ai empruntée par curiosité. Cela tombait bien car le thème des bulles de la semaine est sur les romans mis en BD.

« Le mont Kudo était encore voilé par les brumes matinales de ce début de printemps. La main serrée dans celle de sa grand-mère, Hana franchissait les dernières marches de pierre menant au temple Jison. L’étreinte de la main autour de la sienne lui rappelait que, maintenant qu’elle allait être admise comme bru dans une nouvelle famille, elle cesserait d’appartenir à celle où elle avait vécu les vingt années de son existence. » Telle était l’ouverture du roman, la version graphique montre deux femmes, main dans la main, gravissant les escaliers menant au temple Jison. Elles sont de dos, chevelures brune et blanche côte à côté. Elles sont seules sur la pente montagneuse, l’image fait imaginer le silence troublé par les chants d’oiseaux au petit matin. L’atmosphère est là, bien là.

« Les dames de Kimoto » est l’histoire de quatre femmes, Toyono la grand-mère, Hana sa petite-fille, Fumio l’arrière-petite-fille et Hanako l’arrière-arrière-petite-fille, quatre générations, dans un Japon qui commence à s’ouvrir au monde extérieur et aux étrangers. Cette ouverture bouleversera, peu à peu, les traditions. Le roman éponyme dressait un portait intéressant de la condition féminine dans un Japon traditionnel, un portait doux-amer sur un art de vivre japonais. Les femmes mises en second plan, ne s’occupant que des problèmes domestiques, ne poussant pas trop loin leurs études, garantes de la réputation et des valeurs du clan. Hana devient, peu à peu, la conseillère de l’ombre de son époux, l’aiguillant vers telle ou telle acquisition, vers l’univers de la politique. Elle accepte l’existence de la maîtresse de son mari, comme l’exigeait l’époque dans les classes sociales supérieures, à la grande incompréhension de sa fille Fumio. En marge de la condition féminine, est soulevé la question de la branche collatérale d’une famille, celle représentée par, Kôsaku, le frère cadet de Keisaku. Kôsaku est d’une santé pulmonaire fragile, il lit et étudie beaucoup au point d’être considéré comme un original sans grande envergure. Cependant, il est au fait des bruissements du monde, il devine que ce dernier changera le Japon et a l’intelligence matoise de réclamer des forêts, peu lucratives, et de quoi faire pousser du riz pour sa consommation personnelle. L’homme des livres aura sa revanche sur son frère, l’homme d’action et de terrain.

C’est Fumio, la troisième génération des femmes de Kimoto, qui bousculera la fourmilière au point de fissurer toutes les certitudes. La modernité emporte tout sur l’envie d’ailleurs, l’envie de vivre sa vie, l’envie d’étudier et de gagner son émancipation. Fumio refusera les mariages arrangés et ne jurera que par le mariage d’amour. Elle sera intrépide et souvent cruelle envers sa mère Hana. Quant à Hanako, la fille de Fumio, elle suivra l’exemple de sa mère, devenant une jeune femme moderne et active dans les années d’après-guerre, et faisant le trait d’union entre Hana et Fumio.

Cyril Bonin réussit parfaitement à créer l’atmosphère du Japon de l’ère Meiji, du début du XXè siècle, écarté entre traditions ancestrales et la modernité engendrant moult revendications pour plus de libertés, dans tous les domaines. Les illustrations sont poétiques et d’une grande beauté. Les paysages sont sublimes et l’intimité des intérieurs est traduite avec délicatesse. L’illustrateur accompagne joliment le récit et le sert admirablement : la dernière image est celle d’un Japon au nouveau visage, celui qui réussira à allier tradition et modernité. Même si les descriptions dans le roman ne peuvent être toutes illustrées, j’ai retrouvé, avec joie, son atmosphère et son rythme. Le roman graphique est proche des images que je m’étais faites en lisant « Les dames de Kimoto » et ce, sans me décevoir.

Une réussite. Cependant, le roman reste incontournable.

Quelques avis :

Babelio Mes échappées livresques Petite noisette A propos de livres Ocalypso Un livre dans ma valise Noukette

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Les bulles de la semaine sont à découvrir et lire chez Mokamilla.

Côté polar·Les étapes indiennes·Littérature américaine

La malédiction de Satapur

Inde, 1922, Perveen Mistry a rejoint le cabinet d’avocats de son père et devient ainsi la première femme avocate cependant sans pouvoir plaider au tribunal. Aussi quand une malédiction s’abat sur la famille royale, dans un état princier fictif des Ghats , le Satapur, qui pratique la purdah, c’est à dire la séparation stricte des hommes et des femmes, Perveen est la seule à pouvoir enquêter sur place. Quelle est cette malédiction ? Le maharadjah et son fils aîné sont morts dans des circonstances curieuses et énigmatiques, laissant seules la maharani douairière et la veuve veiller sur prince héritier et sa sœur. Les deux femmes se disputent la primauté sur l’éducation du jeune garçon, la jeune veuve souhaitant, pour éloigner son fils de l’ambiance délétère, qu’il aille étudier en Angleterre. Perveen devra naviguer entre luttes de pouvoir, défiance envers l’autorité britannique et secrets bien gardés, aidée par Colin Sandringham le représentant de l’Agence  de Kolhapur (agence qui a autorité vingt-cinq États princiers et féodaux de l’Inde occidentale dont les fonctionnaires sont des agents politiques et des résidents maintenant les relations entre les deux entités.) afin de parvenir à protéger les enfants royaux.

J’ai retrouvé avec joie le personnage de Perveen, jeune femme courageuse et moderne, luttant contre les préjugés d’une société patriarcale d’une part et pour les droits civiques des habitants de l’Inde, elle fait partie Congrès National Indien et est une adepte des enseignements d’un certain Gandhi.

J’ai apprécié les déplacements dans la jungle bruissante des bourdonnements d’insectes, des cris d’oiseaux et de fauves, odorante de fleurs et de fruits. La nuit tombe rapidement, le brouillard enveloppe la région au petit matin rendant encore plus mystérieux et inquiétant les paysages montagneux. Les villageois peuvent être brusques et secrets ce qui ajoute au malaise général. Perveen doit faire face à tout cela et surtout doit surmonter son attirance envers l’agent britannique, l’intrigant Colin Sandringham, estropié de la Grande Guerre.

J’ai aimé quitter Bombay avec Perveen pour me retrouver en Inde du nord, dans les montagnes et la jungle qui jamais ne dort. La présence des fauves est palpables mais sont-ils les plus dangereux ? Découvrir un autre visage et d’autres traditions de cet immense pays fut très intéressant ce qui a compensé l’absence de la meilleure amie de l’héroïne, celle qui apporte dérision et humour so british.

« La malédiction de Satapur » fut agréable à lire. Me retrouver dans un palais désert, quelque peu décrépi, aux vestiges d’une époque regorgeant de soirées, de dîners, de spectacles de danses traditionnelles, fut ensorcelant. Les fantômes d’un faste oublié sont présents, les couloirs et escaliers jonchés parfois de feuilles et de fleurs fanées, apportent une dimension mélancolique à une période révolue. La modernité est en marche même au cœur des montagnes reculées.

Sujata Massey sait décrire les atmosphères, les paysages qui prennent corps et ampleur au fil de la lecture. Elle prend, également, un malin plaisir à pousser dans ses derniers retranchements son héroïne, Perveen Mistry, la fait quitter à plusieurs reprises sa zone de confort et l’amène à s’interroger sur sa situation matrimoniale, à savoir son statut de femme mariée ayant quitté son époux au mépris de toutes les conventions, sans pour autant être divorcée.

Traduit de l’anglais par Aurélie Tronchet

Quelques avis :

Babelio Toile de mots Mylène Scarlett Une souris et des livres Pestoune Cécilia Hilde

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La bibli des p'tits chats·Littérature coréenne

En attendant Mimi

C’est l’histoire d’Ourson qui a écrit à son amie Mimi pour lui donner rendez-vous sur la colline aux fleurs. Il l’attend, il s’inquiète (Mimi viendra-t-elle ?), il s’interroge (a-t-elle reçu et lu son mot ?) et tout cela fait battre son cœur plus vite et plus fort.

Il tente de trouver la réponse à ses questions en reprenant un jeu d’enfant, auquel nous avons tous joué, celui d’effeuiller les pétales d’une fleur en scandant : viendra ? Viendra pas ? Viendra….viendra pas ? Des insectes sont intrigués tels les papillons, les abeilles, les coccinelles, les fourmis et même deux chenilles, celles qui l’ont assisté dans l’effeuillage d’un rameau.

A chaque fois, il perd le compte des pétales, des feuilles, des points noirs des coccinelles, elles bougent tout le temps les coquines, de la file des fourmis. De guerre lasse, il s’allonge dans l’herbe pour admirer les nuages …. qu’il ne peut s’empêcher de compter afin de répondre à son importante question : a-t-il, finalement, envie de voir Mimi ? Tsss, bien sûr que oui, il en a envie !

« En attendant Mimi » est un album plein de tendresse et de douceur, permettant d’aborder avec les petits l’aventure de l’amour avec ses attentes, ses inquiétudes, ses interrogations. Ourson expérimente les délices de l’attente et des premiers pas (il prendra une décision importante) dans une relation forte en sentiments.

Ourson montre combien prendre son destin en main, tout seul, est plus important que de se fier au comptage des pétales, des feuilles, des nuages ou des points des coccinelles. Il faut oser aller de l’avant sans crainte.

Les illustrations de l’autrice Myung-ye Moon, sont très poétiques et d’une immense douceur. On est près d’Ourson, on s’allonge et on regarde les nuages avec lui, on cueille un bouquet de fleurs, on respire leur parfum … on aime cette jolie colline aux fleurs et on espère que Mimi viendra.

J’ai adoré les commentaires des abeilles, des papillons, des chenilles, des coccinelles et des fourmis, un peu décalés car ne comprenant rien aux préoccupations d’Ourson. Cependant, cela ne les empêche pas d’encourager et d’aider Ourson dans son comptage. J’ai craqué pour les délicieux détails graphiques.

Un album qui a beaucoup plus à mes petits élèves de 4 ans. Ils se sont laissés porter par la douceur poétique des illustrations et le rythme du texte.

Merci aux éditions Michi et à Babelio pour cette très jolie lecture qui fait du bien et aide les petits à grandir.

Dès 3 ans

Traduit du coréen par Nina Lemaire

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Quelques avis:

Babelio Alceste

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Littérature classique·Littérature anglaise·Le Mois anglais·Le jeudi, c'est poésie

Le troisième jeudi, c’est poésie #10

Mois anglais oblige, le jeudi poétique est consacré à un poète anglais. Je sortirai pas des sentiers battus en présentant le célébrissime Sonnet 116 de Shakespeare, mis à l’honneur par Jane Austen dans son roman « Raison et sentiments ». J’ai trouvé la traduction sur internet, n’étant pas anglophone, j’espère qu’elle ne sera pas trop mauvaise.

Let me not to the marriage of true minds
Admit impediments. Love is not love
Which alters when it alteration finds,
Or bends with the remover to remove.
O no! it is an ever-fixed mark
That looks on tempests and is never shaken;
It is the star to every wand’ring bark,
Whose worth’s unknown, although his height be taken.
Love’s not Time’s fool, though rosy lips and cheeks
Within his bending sickle’s compass come;
Love alters not with his brief hours and weeks,
But bears it out even to the edge of doom.
If this be error and upon me prov’d,
I never writ, nor no man ever lov’d.

Je ne veux à l’union de deux âmes sincères

Admettre empêchement. L’amour n’est point l’amour

S’il change en trouvant ailleurs le changement,

Ou s’éloigne en trouvant en l’autre l’éloignement.

Oh non ! il est un phare au regard immuable

Fixé sur la tempête et jamais ébranlé !

Pour tout navire errant il est l’astre qui guide,

Dont on prend la hauteur, mais ne sait l’influence.

L’amour n’est point le jouet du Temps, dont la faucille

Emporte en son croissant les joues et lèvres roses ;

Il n’est pas altéré par les jours, les semaines,

Mais endure et survit jusqu’à la fin des temps.

Si ceci est une erreur, contre moi démontrée,

Nul n’a jamais aimé et je n’ai rien écrit.

Traduction de Robert Ellrodt

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Chat m'plaît·chatperlipopette's chat-lon

Prix Louis Guilloux 2024

Pour la première fois, je participe au Prix littéraire « Louis Guilloux » créé en 1983 par le Département des Côtes d’Armor. Il y a dix romans en lice, 48 médiathèques du département participent à l’événement amenant leurs lecteurs à découvrir des romans sélectionnés parmi la rentrée littéraire d’hiver. Ce sera une expérience intéressante d’autant plus que les clubs-lecture auxquels je participe me permettront d’échanger impressions, peut-être déceptions et surtout enthousiasme de la découverte. J’ai programmé au moins six lectures pour mon été, puisqu’il faut lire a minima six romans sur les dix pour participer au vote. Hier, j’ai assisté au Club-lecture de la commune où j’enseigne, les participants avaient déjà lu un ou deux ouvrages et leurs commentaires m’ont donné envie de m’y plonger.

La BCA, Bibliothèque des Côtes d’Armor, organise, comme chaque année, le prix et les votes. Le département a offert à chaque médiathèque participante la série de dix romans ce qui permettra une fluidité dans les prêts car la plupart des médiathèque, grandes ou petites, ont également acheté une série auprès de leurs libraires indépendants préférés. J’ai jusqu’à mi-septembre pour lire au moins six des dix romans.

La BD de la semaine·La bibli des p'tits chats·Littérature française·Roman graphique/BD

Mamie Polar: des médailles pour Mamie Jo

Mamie Jo n’est pas une mamie comme les autres : c’est Mamie Polar, toujours prête à résoudre des mystères à l’aide de son chien Don Quichotte, ses petits enfants Camille et Lucas accompagnés par leur meilleur ami, Andrea, l’as en informatique et piratage en tout genre. Andrea a une particularité, il est le fils du fameux commandant Duflair dont l’art est d’arriver en retard … comme la cavalerie.

Le cadre des aventures de Mamie Jo est celui des jeux olympiques, JO de Paris oblige. A croire que les JO attirent les incidents en cascade car Mamie Jo et les enfants auront du pain sur la planche pour résoudre plusieurs affaires : une tentative d’assassinat sur un surfeur, le vol des 135 médailles olympiques, une sombre histoire de dopage, un sabotage des épreuves de marathon, l’enlèvement d’un porteur de flamme olympique la veille de la cérémonie d’ouverture des Jeux.

Mamie JO utilise une multitude d’objets insolites pour résoudre les énigmes et ne manque jamais d’idées pour établir des plans imparables afin de coincer les malfrats.

Les enquêtes sont courtes et leur récit en images efficace. Chaque aventure commence par un « Le savais-tu ? » expliquant le sujet principal de l’énigme à résoudre. Les textes sont certes simples mais bien construits ce qui est important pour moi. L’intrigue est toujours pleine de rebondissements et de suspense. Les couleurs sont vives et gaies, les personnages attachants aussi le jeune lectorat peut-il s’y identifier.

J’ai aimé découvrir Mamie Jo, une mamie qui garde ses petits enfants le samedi et avec lesquels elle partage nombre d’aventures rocambolesques et haletantes. Je me demandais s’il y avait un Papi et oui, il existe, il fait une courte apparition dans l’enquête concernant le dopage et Papi mon chou apporte, sans le vouloir, la pièce manquante du puzzle.

Les aventures de Mamie Jo ayant du succès, l’envie de les publier en bande dessinée est logique. Pour moi, l’essai est réussi car lire la bd donnera certainement envie de lire les romans. L’esprit des romans est conservé et servi par des graphismes dynamiques et colorés comme le monde de Mamie Jo.

Merci aux éditions Scrineo et à NetGalley pour leur confiance.

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#DesmédaillespourMamieJo #NetGalleyFrance 

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Les bulles de la semaine sont à lire et à découvrir chez Fanny.

Le Mois anglais·Les lectures abandonnées·Littérature anglaise

Les lectures abandonnées #1

Nouvelle rubrique sur le blog: les lectures abandonnées. C’est toujours difficile de m’avouer vaincue par un livre et je m’accroche au moindre frémissement du texte pour continuer sa lecture. Parfois le frémissement devient élan, alors la lecture s’achève avec le point final de l’histoire. Parfois il retomber aussi vite qu’un soufflé sortant du four, alors la lecture s’arrête là où l’espoir de continuer s’est tu. Je me suis rappelée des droits du lecteur énoncés par Daniel Pennac en 1992 dans « Comme un roman »:

Les droits imprescriptibles du lecteur

  • Le droit de ne pas lire.
  • Le droit de sauter des pages.
  • Le droit de ne pas finir un livre.
  • Le droit de relire.
  • Le droit de lire n’importe quoi.
  • Le droit au bovarysme (maladie textuellement transmissible).
  • Le droit de lire n’importe où.
  • Le droit de grappiller.
  • Le droit de lire à haute voix.
  • Le droit de nous taire.

Je m’autorise à ne pas finir un livre:

La quatrième de couverture m’avait incitée à l’emprunter, le sujet me paraissait intéressant. L’ennui s’est très vite installé malgré le personnage principal sympathique, décalé et gentiment agaçant, jeune oisif londonien. Ce n’est pas parce que l’histoire se déroule dans le milieu gay de Londres, fantaisiste, frénétique dans sa recherche des plaisirs et des conquêtes. Non, non. Sauf qu’au bout de 197 pages, malgré un léger frémissement à la page 190 qui ne s’est pas concrétisé, je ne voyais toujours pas où voulait en venir l’auteur avec son héros un brin rebelle et provocateur. Pour faire simple, la mayonnaise n’a pas pris alors que le roman est devenu culte et a été porté par une critique dithyrambique. J’ai eu la même désagréable impression que lorsque j’ai vu a cinéma, à sa sortie, « Le garçu » de Pialat, film qui m’a laissée de marbre avec la sensation de n’avoir rien compris.

Je reprends les mots de A livre ouvert « Abandonner un livre: ce n’est pas un crime, c’est votre liberté de lecteur. »

Fantastique Fantasy·La bibli des p'tits chats (ados)·Le Mois anglais·Littérature anglaise·Science Fiction

Les chroniques de St Mary T1: D’un monde à l’autre

« Derrière la façade très académique de l’institut St Mary, les équipes d’historiens, de techniciens, de chercheurs ont découvert le secret du voyage dans le temps. Ici on n’étudie pas seulement le passé, on le visite… »

Madeleine Maxwell, jeune historienne, a tout juste terminé ses brillantes études universitaires. Elle rencontre, à point nommé, une de ses anciennes professeurs, Mrs de Winter, qui l’aiguille vers une postulation à l’Institut de recherche de St Mary. Très vite, le jeune femme comprend que la recherche historique n’est qu’un pan des activités de l’Institut qui bouillonne d’agitation et de dynamisme. C’est que l’Institut, grâce à ses chercheurs, ses techniciens, maîtrise le voyage dans le temps et cela ne peut qu’enthousiasmer Madeleine, dite Max, qui voit s’offrir à elle l’opportunité de sa vie : comprendre, en direct, les grands événements historiques.

Elle apprendra à connaître ses pairs et les membres du personnel lors d’un entraînement extrême et rigoureux, à être rompue à toutes sortes de situations aussi improbables les unes que les autres. C’est que l’Institut St Mary n’envoie pas ses Historiens chercheurs n’importe comment dans le passé : les équipes mixtes voyagent dans des capsules de haute technologie et doivent suivre une méthode de travail particulière : étude en temps réel des événements majeurs de l’Histoire, sans interférer avec les contemporains, en nettoyant impérativement avec application l’endroit où les capsules se sont posées et surtout sans rapporter quoi que ce soit du passé pour ne pas chambouler le futur.

Au cours de l’entraînement intensif, les « stagiaires » se dévoilent, les personnalités s’affirment, les amitiés et les inimitiés s’instaurent. Cependant, le maître mot est solidarité … St Mary n’abandonne jamais les siens. Max considère, peu à peu, l’Institut comme sa maison et ses membres comme sa famille. Une famille qu’elle n’a plus pour des raisons mystérieuses que le récit dévoilera, un peu, au cours de son déroulement.

Comment ne pas tomber sous le charme de ces chercheurs farfelus, déjantés, à l’humour féroce et aux empoignades faciles ? J’ai tout de suite aimé Max et sa solitude, Leon Farrell le Chef technicien et sa sollicitude, le Boss grincheux, Mme Cleo Partridge son assistante guindée et parfois sarcastique apparaissant toujours de nulle part. Les personnages sont attachants et bien incarnés sous la plume de l’autrice Jodi Taylor qui ouvre brillamment, avec « D’un monde à l’autre », sa série de SF et de Fantasy « Les chroniques de St Mary ». Il faut savourer les ambiances des romans de voyage dans le temps et se laisser porter par la verve, l’humour et le sens de la narration de l’autrice. C’est un vrai régal, du début à la fin. Pas de temps mort, de l’action, des trahisons (bien entendu il y a des luttes de pouvoir entre deux factions et celle de Clive Ronan, donc des méchants escompte rendre lucratif le voyage temporel), de l’héroïsme, de l’amour et des moments inoubliables au Crétacé parmi les dinosaures ou encore à Alexandrie alors que sa Grande Bibliothèque flambe. Cette luxuriance de rebondissements et de situations parfois rocambolesques est tout sauf du grand Guignol. Non, car le plan historique est intéressant sans se prétendre expert. Aussi, les grincheux qui ne supportent les libertés prises par l’autrice peuvent passer leur chemin car les aventuriers de l’Institut St Mary sont là pour ébouriffer les lecteurs, les coller dans leur fauteuil en leur faisant vivre mille et une émotions, les embarquer dans un tourbillon qu’ils n’auront pas envie de quitter.

Traduit de l’anglais par Cindy Colin Kapen

Quelques avis:

Babelio L’ours inculte Bianca Sophie A touch of blue marine Some times a book

Lu dans le cadre